Incendies en Californie : Don’t look up, version série

Diversion et division. La stratégie est rodée, et à chacune des tragédies climatiques venues réclamer leur tribut de morts et de dégâts matériels, les imbéciles se précipitent pour montrer le doigt et détourner nos regards de la lune.

La chorégraphie se répète aussi sûrement que reviennent ces catastrophes. A peine la rivière rentrée dans son lit ou les feux enfin retombés, les rumeurs les plus absurdes envahissent immédiatement les réseaux sociaux pour accuser les écologistes et les mesures environnementales d’être responsables du drame.

Ces jours-ci, à Los Angeles, alors qu’un mégafeu barjavellien alimenté par la sécheresse et des températures extrêmes dévore les habitations des milliardaires, sous l’œil ému des caméras mondiales, d’autres pyromanes dont Trump en personne instrumentalisent les ravages pour dénoncer les réglementations limitant l’exploitation forestière ou le détournement des réserves d’eau à des fins de conservation de l’habitat d’un poisson d’eau douce. En soufflant sur les braises de la polémique, ils espèrent faire d’une pierre deux coups : accabler leurs adversaires politiques, surtout s’ils sont démocrates, écologistes ou LGBT, et discréditer toutes les politiques auxquelles ils s’opposent, à commencer par les politiques environnementales.

Loin des médias qui ne s’intéressent qu’aux malheurs des riches, les terribles incendies dans les Landes en Gascogne en 2022 avaient donné lieu exactement aux mêmes offensives mensongères. Certains représentants agricoles et forestiers avaient ainsi accusé les restrictions sur les coupes d’arbres imposées par des réglementations écologiques, qu’ils estimaient responsables de l’accumulation de matières inflammables. Des figures politiques, comme certains députés, ont publiquement accusé les écologistes d’entraver les mesures de prévention.

Mais c’est peut-être à Valence que le flot de désinformation et de polémique sordide aura été le plus spectaculaire, comme le raconte (en espagnol) l’ancien eurodéputé Florent Marcellesi. Alors que les inondations ont transformé les rues en torrents destructeurs, et causé des centaines de morts, l’extrême-droite espagnole s’est empressée d’accuser les politiques de renaturation des rivières, promues par des écologistes, qui auraient empêché le nettoyage et le renforcement des berges, aggravant ainsi les crues.

Dans un retournement vicieux, ce ne sont plus les autorités locales – en l’occurrence aux mains de la droite en alliance avec l’extrême-droite – ni les coupes budgétaires drastiques dans les services publics, ni l’impréparation générale, ni le changement climatique, ni nos modes de vie qui sont en cause.

La vérité, c’est que de la Californie à l’Australie ces mégafeux, très bien analysés par Joelle Zask, sont désormais notre nouvelle normalité. La vérité, c’est que les responsables ne prennent pas leur responsabilité. Au lieu de préparer nos administrations et nos territoires à affronter le nouveau régime climatique ils préfèrent se renvoyer les mauvaises balles et faire porter le chapeau à celles et ceux qui annoncent depuis longtemps qu’il faut tout changer. La vérité, c’est qu’il est urgent de sortir de la complaisance.

La vérité c’est qu’il faut changer nos villes, changer nos vies. Vite.

Ces débats, souvent nourris par des intérêts économiques et idéologiques, détournent l’attention des véritables causes : un dérèglement climatique global et une gestion inadéquate des territoires. Blâmer les écologistes revient à éluder le rôle central des émissions de gaz à effet de serre et des défaillances structurelles dans la gestion des écosystèmes, alors que ces catastrophes exigent des réponses collectives et ambitieuses.