Coluche disait « Les hommes naissent libres et égaux, mais certains sont plus égaux que d’autres ». De son côté, dans un article de 2015, le Figaro rappelait que la Seine-Saint-Denis avait un taux de pauvreté de 20,7% et qu’à l’opposé, les Yvelines concentraient 8,2% d’individus sous le seuil de pauvreté. Ces disparités sont le résultats du développement économique et social de notre Région qui a structuré la pauvreté à l’échelle métropolitaine et concentré un nombre plus élevé de familles en difficulté en Seine-Saint-Denis que dans les autres département franciliens.
Pour tenir compte de ces différences et des spécificités de notre département, une partie du coût de la carte Imagin’R des collégiens et des lycéens boursiers était prise en charge par la Région Île-de-France et le conseil départemental de la Seine-Saint-Denis à hauteur de 66 % pour la Région et de 34 % pour le conseil départemental. Pour tous les autres département franciliens, cette prise en charge se répartissait à 50/50 entre les deux collectivités. Aujourd’hui les règles ont changé : la Région ne prendra plus en charge que la moitié du coût de cette carte. Ainsi, en voulant traiter la Seine-Saint-Denis comme tous les autres départements d’Île-de-France, la part laissée à la charge des familles des élèves boursiers devrait augmenter de 33 €.
Suite à cette décision, les réactions n’ont pas manqué et ce malgré la période estivale. De son côté, le Conseil départemental dénonce cette nouvelle convention avec la Région qui lui rétorque qu’il avait pourtant donné son accord par la voix de sa représentante au moment du vote à « Île-de-France Mobilité » (ex-STIF). S’ensuit un dialogue de sourd et de démentis en mode « c’est pas moi c’est lui ». Au milieu de tout ça, le porte-monnaie des élèves boursiers ou de leurs parents continue d’être la variable d’ajustement de cet exercice de comptabilité institutionnelle.
Cette répartition financière du coût du transport pour les élèves boursiers est très inquiètante, quand pour Laurent Probst (directeur général d’Ile-de-France Mobilité ) cette nouvelle convention s’est établie au nom de l’équité. Confusion des genres ou erreur conceptuelle ? L’équité ça n’a jamais été tous pareil, mais cela consiste à donner davantage à ceux qui en ont le plus besoin pour leur permettre l’égalité d’accès au droit. Or, pour redonner toutes leurs chances aux élèves boursiers de Seine-Saint-Denis, il ne nous semble pas que cela passe par une augmentation de leur charge financière pour se rendre en cours, bien au contraire. Pis, c’est un bien mauvais signal en faveur de l’inclusion : pour les familles les plus en difficulté, 33 €, cela représente une baguette de pain par jour de moins pendant un mois !
Mais pourquoi tout d’un coup, à quelques semaines de la rentrée, La Région a-t-elle décidé de changer les règles du jeu ? Nous avons tous entendu le Président de la République demander aux collectivités « 13 milliards d’économies en échange de plus de libertés ». Message reçu, les collectivités semblent avoir choisi la liberté de reporter sur les parents les « économies » exigées par l’éxécutif national.
Les parents n’ont rien à gagner à accepter cette externalisation des coûts, si ces économies pour la Région consistent à économiser d’un côté ce que l’on devra payer de l’autre. Cette privatisation rampante du coût de l’éducation en reportant une partie des dépenses sur les familles n’est pas acceptable. Il nous semble que le courage consisterait à demander ces 33€ à celles et ceux qui exigent les 13 milliards d’économie plutôt qu’aux parents des élèves boursiers. Après le story-telling de la diminution de 5€ des APL, encore une fois on préfère s’attaquer aux plus démunis plutôt qu’aux puissants.
En créant cette nouvelle taxe indirecte de 33€ et dont les élèves boursiers devront s’acquitter auprès d’« Île-de-France Mobilité » au moment de l’achat de leur carte Imagin’R, nous assistons à la négation des spécificités territoriales de notre Région et par là même de son identité. Travailler à la concorde sociale de l’Île-de-France exige que certains de ses territoires bénéficient d’une attention bienveillante particulière. Au lieu de cela, la Région crée inutilement les conditions de la colère de la jeunesse de Seine-Saint-Denis,ajoutant des difficultés supplémentaires à un système éducatif à bout de souffle en préconisant que chaque département gère ses problèmes comme si les habitants de Seine-Saint-Denis restaient cloîtrés à l’intérieur de ses frontières départementale et comme si les parents des élèves boursiers ne contribuaient pas à la richesse régionale par exemple en travaillant dans les autres départements franciliens.
La FCPE de la Seine-Saint-Denis entend s’opposer à cette augmentation de charge pour les familles et appelle à soutenir les élèves boursiers et leurs parents en signant la pétition conjointe FCPE 93 et FIDL sur le lien suivant :
Rodrigo Arenas, Président de la FCPE de la Seine-Saint-Denis.