Quand Jean-Michel Blanquer affirme que les personnes vaccinées ne peuvent pas transmettre le Covid 19, au mieux, il se trompe, au pire, il ment. En effet, les études nord-américaines et israéliennes démontrent aujourd’hui que la vaccination n’empêche ni d’attraper le Covid ni de le transmettre. Néanmoins, la vaccination ralentit la progression de la pandémie – et encore, avec le nouveau variant Delta, les Etats-Unis n’en sont plus si sûrs. Surtout, la vaccination permet d’empêcher les formes graves de la maladie, ce qui est déjà une formidable avancée, même si la durée de la protection des vaccins semble se réduire.
Compte-tenu de nos connaissances actuelles, est-il donc légitime d’imposer « l’éviction » des enfants non vaccinés dans certains contextes scolaires : quand ils vont à la piscine, quand ils effectuent des sorties culturelles (théâtre, cinéma, musée, bibliothèque…), quand ils sont « cas contact »… ? Pour ce qui nous concerne, la réponse est non.
Cette distinction entre élèves vaccinés ou non vaccinés nous paraît scientifiquement inefficace et socialement discriminante. Puisque, même si elle la ralentit, la vaccination n’empêche pas la transmission du variant Delta (90% des contaminations en France), pourquoi faudrait-il exclure de l’Ecole ces jeunes non vaccinés ? Ils sont peut-être potentiellement plus à risque de contamination que celles et ceux qui sont vaccinés, mais on est aujourd’hui dans l’incapacité de dire dans quelle proportion. De plus, on sait aussi que les enfants vaccinés peuvent être malades et transmettre eux aussi la maladie. Alors, à quoi bon mettre en place un système de tri qui ne sert à rien ?
En outre, les enquêtes montrent que les Français les moins vaccinés sont issus des classes populaires, ce qui est corrélé par le faible taux de couverture vaccinale de certains départements comme la Seine-Saint-Denis. Cette fracture vaccinale se retrouvera donc chez les jeunes issus des milieux sociaux les moins favorisés : ce sont eux qui seront exclus d’un certain nombre d’activités scolaires, eux qui seront désignés comme cas contacts exclus de la classe alors même que ce sont eux qui ont le plus besoin de cette Ecole ! De plus, ce sont encore les femmes qui seront pénalisées par cette mesure car ce sont elles qui devront poser des jours afin de garder leur enfant « cas contact », ce sont elles qui verront leur salaire se réduire, ce sont elles qui reverront à la baisse leurs ambitions professionnelles…
Tout cela sans parler du secret médical dont on ne sait pas qui, à l’Ecole, sera habilité à le transgresser pour effectuer ce tri, sans parler du fait que ces enfants n’ont rien choisi puisque leur statut vaccinal dépend du bon vouloir de leurs parents.
Puisque le Pass sanitaire n’est pas demandé à l’Ecole, nous demandons à ce que cette distinction entre enfants vaccinés et non-vaccinés, inefficace et discriminante, soit retirée du protocole sanitaire de rentrée qu’il faut donc repenser. Cette mesure doit être remplacée par d’autres plus pertinentes que l’Etat se refuse pourtant à mettre en place depuis des mois, à commencer par l’embauche massive de personnels pour permettre l’encadrement de petits groupes d’élèves. Plus votre groupe classe est petit, moins la contamination est importante, mieux vous gérez les gestes barrière. Nos enfants ne peuvent pas continuer à payer le prix lourd de cette pandémie : ils doivent continuer à s’instruire dans les meilleures conditions possibles, à savoir avec des personnels éducatifs à leurs côtés, sans subir de discrimination d’aucune sorte ! Cela demande des investissements massifs, certes plus coûteux qu’un Pass sanitaire déguisé, tant dans le bâti scolaire que dans les personnels, mais bien plus efficaces sur le long terme. A un mois de la rentrée scolaire, il est encore temps d’investir dans l’Ecole !
Il est tout aussi essentiel d’être le plus transparent possible, en particulier sur le rapport du bénéfice/risque de la vaccination des 12-18 ans.
Rodrigo Arenas&Nathalie Laville.