Coronavirus : comment garantir l’égalité des élèves devant les examens ?
Article journal La Croix, propos recueillis par Emmanuelle Lucas,
« Les inégalités vont se révéler encore davantage »
Rodrigo Arenas, coprésident de la fédération de parents d’élèves FCPE
« Le coronavirus n’est pas responsable des inégalités scolaires qui existent déjà dans l’enseignement. On sait très bien que le baccalauréat n’a pas la même valeur selon les territoires et les établissements. Ceci étant dit, ces inégalités vont se révéler encore davantage en cette période de crise : la solution proposée aux enfants dont les écoles sont fermées, suivre les cours par Internet, correspond peut-être aux besoins de 90 % des familles mais laisse sur le bord du chemin les 10 % restantes.
L’accroissement des inégalités
Il y a, d’un côté, ceux dont les familles bénéficient d’un bon équipement informatique, qui vivent dans des villes où la qualité du réseau est satisfaisante et, de l’autre, ceux qui n’ont ni l’un ni l’autre. Il existe aussi de grandes inégalités dans les usages informatiques. Dans certaines familles, par exemple, les enfants se débrouillent mieux que leurs parents devant un ordinateur. Comment ces parents-là pourront-ils dès lors accompagner leurs enfants ?
Je pense aussi aux élèves en situation de handicap. Comment vont-ils pouvoir suivre un cours sur Internet ? Bref, je crains que tous les enfants qui sont un peu éloignés de la norme soient confrontés à de grosses difficultés. D’autant que les professeurs ne sont toujours pas formés à l’enseignement à distance. Il y a fort à parier que les chefs d’établissement se retrouveront, parfois, dans une grande solitude quand ils devront organiser ces cours. Et que les inégalités vont, là encore, se creuser en fonction des compétences des équipes pédagogiques.
Une solution très classique
En outre, je trouve particulièrement dommage que le ministère se contente de reprendre des solutions, au fond, très classiques.
Ces cours magistraux, donnés par Internet, seront très peu interactifs et ressembleront, en fait, ni plus ni moins, aux polycopiés qui auraient pu être envoyés par La Poste il y a dix ans, en pareilles circonstances. Pourtant, Internet, média collaboratif par excellence, propose des ressources beaucoup plus intéressantes.
Si l’Éducation nationale avait mis en place des outils collaboratifs depuis quelques années, les élèves auraient d’ailleurs pu poursuivre leurs travaux communs – grâce à des réseaux sociaux créés à l’échelle de la classe par exemple, ou à des messageries sécurisées. De tels outils prouveraient leur utilité en ce moment. Ils permettraient aux enfants de continuer à évoluer ensemble, ce qui est une mission essentielle de l’école, et un bon moyen d’expérimenter la solidarité. Et donc de lutter contre les inégalités. »